Pondichéry, comme chaque année, marque l’ouverture des hostilités festivités pour les élèves de Terminale. Evidemment, les sujets qui y tombent ne seront pas photocopiés tels quels pour être distribués le 17 Juin en métropole. A strictement parler, ils ne permettent même pas de se faire une idée d’une quelconque ligne éditoriale annuelle. Ils ne sont que l’occasion d’un exercice ponctuel, permettant d’élargir un peu plus la gamme des sujets auxquels on se sera, l’année durant, confronté. Peut-on s’empêcher de remarquer que la liberté est proposée à la sagacité des élèves dans toutes les filières ?
Voici donc, comme si vous y étiez, mais sans la pression, les sujets qui ont été donnés en philosophie, au lycée français de Pondichéry.
Série L :
Pas de série littéraire cette année à Pondichéry. Il faudra patienter jusqu’à l’année prochaine pour voir cette filière proposer de nouveau des sujets en terminale.
Série S :
1 – Sommes-nous d’autant plus heureux que nous sommes plus libres ?
2 – La technique doit-elle permettre de dépasser les limites de l’humain ?
3 – Expliquez le texte suivant :
« L’Étranger : Pourquoi est-il nécessaire de faire des lois, si la loi n’est pas ce qu’il y a de plus droit ? Il nous faut en trouver la raison.
Socrate le jeune* : Oui, sans contredit.
L’Étranger : N’y a-t-il pas, chez vous, comme dans les autres cités, des exercices physiques, pratiqués par des hommes en groupe, où l’on entre en compétition, soit à la course, soit à d’autres épreuves ?
Socrate le jeune : Oui, certes, et il y en a même beaucoup.
L’Étranger : Eh bien, remettons-nous en mémoire les instructions que donnent, en pareilles circonstances, ceux qui dirigent l’entraînement selon les règles.
Socrate le jeune : Lesquelles ?
L’Étranger : Ils pensent qu’il n’y a pas lieu d’entrer dans le détail pour s’adapter à chaque cas individuel, en donnant des instructions qui s’adaptent à la condition physique de chacun. Au contraire, ils estiment qu’il faut envisager les choses en plus gros, en donnant des instructions qui seront avantageuses pour le corps, et ce dans la majorité des cas et pour un grand nombre de gens.
Socrate le jeune : Bien.
L’Étranger : Voilà bien pourquoi, imposant le même entraînement à des groupes de gens, ils les font commencer en même temps et arrêter au même moment, à la course, à la lutte et dans tous les exercices physiques.
Socrate le jeune : C’est bien le cas, oui.
L’Étranger : Il nous faut également penser que le législateur, qui doit donner à ses troupeaux des ordres en matière de justice ainsi que de contrats mutuels, ne sera jamais en mesure, en édictant des prescriptions pour tous les membres du groupe, d’appliquer à chaque individu la règle précise qui lui convient.
Socrate le jeune : Sur ce point, du moins, c’est vraisemblable.
L’Étranger : Il édictera plutôt, j’imagine, la règle qui convient au grand nombre dans la plupart des cas, et c’est de cette façon, en gros, qu’il légifèrera pour chacun, qu’il mette les lois par écrit ou qu’il procède sans recourir à l’écriture, en légiférant au moyen des coutumes ancestrales.
Socrate le jeune : C’est juste.
L’Étranger : Bien sûr que c’est juste. Car Socrate, comment pourrait-il y avoir quelqu’un qui serait capable, à tout instant de la vie, de venir s’asseoir auprès d’un chacun pour lui prescrire précisément ce qu’il lui convient de faire ? »
PLATON, Le Politique (IVe siècle avant J.C.)
Série ES
1 – Faut-il ne désirer que ce qui est accessible ?
2 – La liberté peut-elle être un fardeau ?
3- Expliquer le texte suivant :
« Ceux qui veillent (comme ils disent) à donner de bons principes aux enfants (bien peu sont démunis d’un lot de principes pour enfants auxquels ils accordent foi), distillent1 dans l’entendement jusque là sans prévention2 ni préjugés ces doctrines qu’ils voudraient voir mémorisée et appliquées (n’importe quel caractère se marque sur du papier blanc) : elles sont enseignées aussitôt que l’enfant commence à percevoir et, quand il grandit, on les renforce par la répétition publique ou par l’accord tacite3 du voisinage ; ou au moins par l’accord de ceux dont l’enfant estime la sagesse, la connaissance et la piété et qui n’acceptent que l’on mentionne ces principes autrement que comme la base et le fondement sur lesquels bâtir leur religion et leurs mœurs : ainsi ces doctrines acquièrent-elles la réputation de vérités innées, indubitables et évidentes par elles-mêmes.
On peut ajouter que, lorsque des gens éduqués ainsi grandissent et reviennent sur ce qu’ils pensent, ils n’y peuvent rien trouver de plus ancien que ces opinions qu’on leur a enseignées avant que la mémoire ait commencé à tenir le registre de leurs actes ou des dates d’apparition des nouveautés ; ils n’ont dès lors aucun scrupule à conclure que ces propositions dont la connaissance n’a aucune origine perceptible en eux ont été certainement imprimées sur leur esprit par Dieu ou la Nature et non enseignées par qui que ce soit. Ils conservent ces propositions et s’y soumettent avec vénération, comme beaucoup se soumettent à leurs parents non pas parce que c’est naturel (dans les pays où ils ne sont pas formés ainsi, les enfants n’agissent pas ainsi) mais parce qu’ils pensent que c’est naturel : ils ont en effet toujours été éduqués ainsi et n’ont pas le moindre souvenir des débuts de ce respect. »
LOCKE, Essai sur l’entendement humain, 1689
1 introduisent petit à petit
2 défiance
3 sous-entendu, non formulé
Séries techniques :
1 – Les échanges favorisent-ils la paix ?
2 – L’expérience instruit-elle ?
3 – Explication de texte :
» Même la capacité intérieure de juger peut tomber sous la dépendance d’un autre, dans la mesure où un esprit peut être dupé par un autre. Il s’ensuit qu’un esprit ne jouit d’une pleine indépendance, que s’il est capable de raisonnement correct. Bien plus : puisque c’est par la force de l’esprit plus que la vigueur du corps qu’il faut évaluer la puissance humaine, il en résulte que les hommes les plus indépendants sont ceux chez qui la raison s’affirme davantage et qui se laissent davantage guider par la raison. En d’autres termes, je déclare l’homme d’autant plus en possession d’une pleine liberté, qu’il se laisse guider par la raison. »
Spinoza, Traité politique, 1667
1. Dégagez la thèse de ce texte et montrez comment elle est établie.
2. Expliquez :
a) « Même la capacité intérieure de juger peut tomber sous la dépendance d’un autre ».
b) » Un esprit ne jouit d’une pleine indépendance, que s’il est capable de raisonnement correct. »
c) « C’est par la force de l’esprit plus que la vigueur du corps qu’il faut évaluer la puissance humaine. »
3. Sommes-nous d’autant plus libres que nous nous laissons guider par la raison ?