Nouvelle proposition de traitement de sujet, conçue à partir d’analyses, distinctions et références travaillées cette année en cours. Ca donne une dissertation un peu massive. Mais on peut s’intéresser, surtout, à sa structure, qui cherche à proposer, consécutivement, des distinctions entre sciences expérimentales et sciences humaines, entre quête de lois et recherche de sens, avant de remettre en question le présupposé fondamental du sujet : au fait, la science est-elle avant tout caractérisée par son aptitude à répondre aux questions ? Ou à les poser ?
Introduction
Quand on ne sait pas quelque chose, on a l’habitude de chercher la réponse à la question qu’on se pose auprès d’une source qui dispose de la connaissance dont, soi-même, on manque. Et si jadis c’était aux intermédiaires religieux entre les hommes et les dieux qu’on allait chercher le savoir, c’est peu à peu aux scientifiques qu’on s’en est remis, leurs réponses ayant l’avantage de s’appuyer sur des raisons qu’on pouvait partager, des raisonnements dont on pouvait vérifier soi-même la rigueur logique. On peut observer l’importance grandissante des experts dans nos vies quotidienne, et la façon dont les scientifiques sont appelés à l’aide dès que nous nous trouvons dans l’incertitude, dès que l’inconnu nous paralyse : l’expert, alors, peut nous éclairer, nous informer, et nous orienter dans nos choix. Et si nous nous fions à lui, c’est parce que nous prêtons aujourd’hui à la science une autorité qu’autrefois on plaçait chez les religieux. Pourtant, il n’est pas certain que toutes les questions puissent ainsi trouver une réponse scientifique. Car en ne s’en remettant qu’à la science, on commet peut-être deux types d’erreurs. Tout d’abord, on présuppose que la science soit capable, dans son ensemble, de répondre à n’importe quelle question, quel que soit le champ dans lequel elle se pose. Or, d’une part, chacun est suffisamment facétieux pour produire une grande quantité de questions auxquelles aucune science ne répondrait (Qu’est-ce qu’on mange ce soir ? Que faut-il penser de la gifle donnée par Will Smith à Chris Rock ? Qui sera élu Président de la République en 2057 ?) ; d’autre part, et moins facétieusement, la recherche scientifique suit certaines règles, et celles-ci commencent par la délimitation précise du champ d’action au sein duquel la science est légitime. Et on peut considérer dès lors que toutes les questions n’appartiennent pas à ce champ. La deuxième erreur consiste peut-être à postuler que la science a pour objectif premier d’apporter des réponses aux questions qu’on lui pose. Or c’est là une position qu’on sera amené à remettre en question. On essaiera donc tout d’abord de circonscrire la science aux questions portant sur des phénomènes pouvant être modélisés sous formes de lois intangibles, mais on constatera qu’il y a peut-être quelque chose à perdre à ne considérer ainsi comme scientifiques que les questions relevant des sciences physiques. Ainsi, après avoir montré quelle est la légitimité de la recherche en sciences humaines, on émettra cette hypothèse : peut-être les sciences n’ont-elles pas comme objectif la possession de la vérité, mais uniquement la quête de celle-ci.
Développement
1 A – La science, selon le modèle qu’en donnent les sciences physiques, s’appuie sur le principe de causalité, lui-même conditionné par cet autre principe : le déterminisme. On ne peut connaître les phénomènes que dans la mesure où ils s’accomplissent selon des lois constantes, permettant de les prévoir. Cette façon de concevoir la connaissance scientifique s’applique tout particulièrement aux sciences physiques puisque celles-ci tentent de décrire le monde de façon strictement mécanique, s’appuyant sur une réduction des phénomènes à un ensemble de mesures permettant de repérer des constantes dans la succession des phénomènes, d’unir ceux-ci les uns aux autres par un réseau de lois qui ont pour principe d’être cohérentes les unes avec les autres. C’est la raison pour laquelle l’observation, en sciences, ne suffit pas. Il faut que les phénomènes soient transformés en données par les instruments de mesure, et que celles-ci entrent dans un calcul, qui permettra d’établir comment telle cause va produire tel effet. C’est après tout une conception de la connaissance rigoureuse conforme à ce que définissait Kant : il n’y aurait de connaissance véritable que des phénomènes observables, parce que sans observation, la raison tourne à vide, et si on peut représenter les phénomènes sous forme d’équations, il faut néanmoins qu’on dispose de données pour alimenter celles-ci, et éviter de les faire tourner à vide. C’est la raison pour laquelle, pour Kant, la science n’a rien à répondre aux questions métaphysiques : savoir si Dieu existe ou pas ne relève pas de la science. Déterminer ce en quoi consiste le bonheur non plus.
B – Une autre catégorie de questions ne relèverait pas de la science : celles qui portent sur les phénomènes hasardeux. Ceux-ci échapperaient en effet à la science puisqu’aucune loi constante ne permettrait de les saisir. Mais il faut nuancer cette limitation en observant ceci : la science a pour ce type de phénomènes une méthode spécifique : elle leur applique une méthode particulière. Le recours aux statistiques, par exemple, illustre les précautions qu’on prend scientifiquement avec les phénomènes imprévisibles. Si on ne peut pas répondre scientifiquement à la question « sur quelle face la pièce tombera-t-elle ? », on peut en revanche établir statistiquement que plus on augmentera le nombre d’expérimentations, plus le taux de chaque face approchera les 50%. D’ailleurs, ce qu’ont progressivement montré les sciences physiques, c’est que ce qu’on prend pour du hasard dans la nature, est en réalité imputable à la complexité d’un certain nombre de phénomènes. Ainsi, le tirage du Loto peut sembler hasardeux. Mais en réalité, s’il est imprévisible c’est moins parce qu’il relève du hasard que parce qu’il implique un trop grand nombre de causes, des interactions beaucoup complexes pour être observables et calculables. Pour autant, avec une plus grande puissance de calcul, et un système de capteurs beaucoup plus évolué, et précis, on pourrait parvenir à prédire, sans don de divination, au moment où la sphère contenant les numéros se met en mouvement, le tirage du Loto.
C – Le seul ilot de contingence dans l’univers serait alors l’être humain qui, parce qu’il est doté de libre-arbitre, peut réellement agir sans causes. Ainsi, il échapperait à toute description et prévisibilité scientifique. Mais ici aussi, les statistiques permettraient de se faire une idée de la façon dont, très globalement, se comporte une population. C’est par exemple ce qui eut lieu quand, en 1897, Durkheim appliqua les principes de la science à un comportement aussi intimement humain que le suicide. Là où auparavant on tenait au sujet de cet acte un discours moral, soudain, on le regarde avec la froideur des relevés chiffrés et anonymes des registres d’hôpitaux. Et c’est ainsi que Durkheim se rend compte que ce phénomène est moins hasardeux qu’on ne pourrait le penser, puisqu’on observe des courbes constantes, liant entre autres la hausse des suicides à la hausse des interactions humaines : plus la vie sociale est intense, plus on se suicide. Quant aux femmes, c’est surtout le dimanche qu’elles tentent de mettre fin à leurs jours. C’est le signe que ce phénomène ne relève pas uniquement du bon vouloir ou du hasard, mais obéit à des règles que la quantification aide à élucider. On ne pourrait pas déterminer correctement comment telle ou telle personne sera amenée à agir, mais on peut montrer qu’il existe un déterminisme statistique, qui permet de comprendre non pas tel acte ; mais un certain type d’acte. Après tout, on retrouve ici l’affirmation ancienne d’Aristote, selon lequel il n’y a de science que du général, le particulier demeurant impossible à connaître.
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Ainsi, pour le dire simplement, la science serait bel et bien capable de répondre aux questions portant, au sens très large, sur ce qu’on est susceptible d’observer, qu’il s’agisse de phénomènes concernant strictement la matière, ou les comportements humains. Cependant, concernant ce dernier cas de figure, on risque peut-être, en les réduisant à une suite mécanique de causes et d’effets, de passer à côté de leur spécificité. Peut-être relèvent-ils moins de la recherche de lois que de la quête de sens. Peut-être réclament-ils un travail d’interprétation, plutôt qu’une analyse froidement quantitative.
2 A – C’est le rôle des sciences humaines que de s’intéresser aux mécanismes qui régissent les actions et interactions humaines. Leur justification tient au moins à ceci : quand bien même il y aurait en l’homme une aptitude à agir en dehors de tout déterminisme, il n’est pas non plus pure liberté : en lui des mécanisme biologiques, économiques, sociologiques, linguistiques, psychologiques s’accomplissent, dont on peut connaître les règles, les lois, ce qui permet de décrire correctement les phénomènes humains. A ce compte-là, on s’aperçoit que les efforts conjoints des sciences humaines ont permis de prévoir efficacement certains types de phénomènes, tels que les choix de conjoints, la façon dont les parents attribuent un prénom à leur enfant. C’est sur ces connaissances que peuvent s’appuyer des techniques telles que le management, la vente, la gestion à grande échelle des populations et, donc, la politique. A ce titre, on peut effectivement parler de « science politique ». Et l’avènement de la collecte, en quantités extrêmement importantes, de données concernant chacun des êtres humains, si elle ne permet pas d’établir à l’avance quel sera le comportement de chacun, autorise en revanche une connaissance de plus en plus fine des grands mécanismes à l’œuvre au sein des populations, et la maîtrise de ces phénomènes.
B – Ce faisant, les sciences humaines répondent à la question « comment ? » : comment se font les échanges, comment les techniques évoluent, comment certains régimes politiques produisent les formes sociales qui vont concourir au soulèvement du peuple contre l’autorité qui pèse sur lui. Mais elles ne répondent cependant pas à un autre régime de questionnement, qui ne relève pas de la démonstration et des preuves, mais fait plutôt l’objet d’une tentative d’interprétation : « Pourquoi ? ». Celui-ci, parce qu’il cherche du sens plutôt que des lois, et parce qu’il impose un dialogue sans fin entre des interprétations qui, tout en étant concurrentes, ne permettent pas de discerner l’une d’elles comme « vraie », alors que toutes les autres seraient fausses, est plutôt en quête de propositions qui puissent être considérées comme « justes ». C’est ce que fait Nietzsche lorsqu’il évoque la possibilité de l’Eternel Retour, pas parce qu’il s’agirait d’une réalité physique, mais parce que vivre selon l’idée du Retour Eternel des mêmes phénomènes imposerait de vouloir véritablement sa vie, et non de la mener dans le laisser-aller. Ainsi, une existence menée dans la perspective de cet Eternel Retour aurait plus de sens qu’une vie qui serait vécue comme si ce n’était qu’un seul et même mauvais moment à passer, sans lendemain. Elle serait plus juste. De même, la question de l’existence de Dieu, chez Nietzsche, n’attend pas une réponse, quelle qu’elle soit, qui pourrait être considérée comme vraie, ou fausse. Nietzsche récuse l’attachement à la vérité, qui n’est pour lui qu’une croyance inavouée par ceux qui, parallèlement, affirment préférer la science à la croyance. En réalité, il est beaucoup plus intéressant de se demander si l’existence a plus de sens, si elle est plus juste quand elle est vécue dans la compagnie de Dieu, ou en son absence.
C – Ce n’est pas un hasard si la philosophie fait partie des disciplines qui, le plus, ont été affectées à cette recherche de sens, et si l’objet spécifique de cette discipline s’est trouvé, depuis Platon, au-delà de la matière, dans cette sphère qu’on nomme « métaphysique ». On l’a évoqué plus tôt : au 18e siècle, Emmanuel Kant a précisément délimité quelles pouvaient être les prétentions de la métaphysique : d’après lui, les questions que pose celle-ci ne peuvent faire l’objet d’un traitement scientifique, car elles ne relèvent pas des phénomènes et portent sur des objets dont l’existence demeurera éternellement hypothétique. Sans nier la possibilité que la pensée puisse se porter sur des questions métaphysiques, Kant établit que ces questions ne pourront pas recevoir de réponse d’ordre scientifique : il n’y a dans ces domaines aucune connaissance véritable possible. On peut croire, mais on ne peut pas savoir. La sphère de la connaissance est donc bornée, puisque l’humanité est susceptible de se poser des questions, plus cruciales encore que celles auxquelles répondent les sciences expérimentales. Et si la sphère scientifique s’arrêtait strictement à la physique, laissant de côté tout ce qui échappe à la dialectique expérimentale, l’humanité serait invitée, finalement, à perdre contact avec une partie d’elle-même, celle qui, inquiète, se pose des questions qui permettent plus de suppositions que de certitudes, mais constituent pourtant la toile de fond de son existence. Kant lui-même montre d’ailleurs que les questions métaphysiques méritent d’être posées, et méditées, quand il aborde dans sa Critique de la faculté de juger la question de la connaissance du vivant. La vie, en effet, n’est pas un phénomène observable. On n’observe que du vivant, on n’observe jamais la vie. Cependant, Kant se livre au sujet du vivant à une réflexion qui lie celui-ci au jugement esthétique, reconnaissant ainsi la spécificité de ce champ d’étude, le plaçant hors de la sphère de la stricte connaissance d’ordre scientifique, sans pour autant lui refuser un traitement méthodique.
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En réalité, il semble que si on prend la précaution de préciser que certaines sciences sont expérimentales, correspondant exactement à ce que Kant considérait comme relevant légitimement de la connaissance, il puisse exister aussi d’autres disciplines qui, parce qu’elles sont conscientes de leurs difficultés à établir expérimentalement leurs hypothèses, doivent développer des méthodes et une prudence particulières. Et on pourrait considérer qu’après tout, plutôt que par ses objets d’étude, la science se définisse par le soin mis à recourir à des méthodes qui correspondent exactement à ce qu’elle étudie. On pourrait, cependant, être tenté de distinguer parmi les sciences, celles qui parviennent à des réponses, et les autres. Mais peut-être commettrait-on ici une erreur, en se trompant sur ce qui constitue l’essence même de la science, toutes disciplines confondues.
3 A – Une théorie est un ensemble constitué et cohérent de propositions décrivant les relations de cause à effet au sein d’un ensemble de phénomènes. L’horizon que vise toute théorie, c’est l’univers, les lois énoncées ayant pour ambition d’être universellement valables. Ainsi, le but de toute science, c’est l’unification de l’ensemble des phénomènes sous une seule et même théorie. Mais si c’est bien là l’horizon poursuivi par la science, il n’est pas, et de loin, atteint : comme tout horizon, l’idéal de théorie ultime s’éloigne du scientifique au fur et à mesure qu’il s’avance vers lui. C’est ce qu’établit Karl Popper au 20e siècle : toute théorie scientifique est provisoire. Ce faisant, il réintègre ce qu’on appelle communément la science dans la sphère des disciplines incertaines, comme on pourrait le dire, par exemple, de la philosophie. Ce faisant, plutôt que la figure du savant, qui est caractérisée par son savoir, le fait qu’on puisse venir le rencontrer afin d’apprendre la vérité, Karl Popper place en avant la figure du chercheur, qui se méfie de ce qui est présenté comme vrai, et demeure conscient du caractère provisoire de toute connaissance scientifique.
B – Une théorie, à strictement parler, n’est que l’expression provisoire de ce sur quoi la communauté scientifique parvient à se mettre d’accord. A plus grande échelle, on désigne comme « paradigme », l’ensemble des énoncés scientifiques, toutes disciplines confondues, constituant une représentation globale, unifiée et cohérente du monde. Mais ce que montre Popper, c’est qu’à aucun moment un système scientifique ne peut prétendre être l’énoncé de la vérité elle-même. C’est même le contraire : pour être scientifique, un énoncé doit pouvoir être mis à l’épreuve. Et tant qu’il résiste à cette mise à l’épreuve, il peut être considéré comme vraisemblable. Il suffit d’avoir quelques rudiments d’histoire des sciences pour le constater : si on observe l’évolution des sciences physiques, on constate que cette discipline a connu, particulièrement au 20e siècle, plusieurs remises en question profondes, et ce jusque dans ses fondements. Quand Einstein envisage l’espace-temps relativement, et non plus absolument, il remet en question, en fait, les fondements même de la physique tels que la physique newtonienne les avait conçus, et tels qu’ils étaient mis en œuvre jusque-là. Ainsi, pour Popper, une théorie n’est pas caractérisée par sa vérité, mais par sa vérisimilitude, qui implique sa falsifiabilité : aucune expérimentation définitive ne peut prouver qu’une théorie soit juste. Une seule expérimentation ratée établira définitivement sa fausseté. Dès lors, une théorie est simplement une hypothèse qui, jusque-là, tient le coup contre les tentatives de la falsifier.
C – Dès lors, la science n’est pas vraiment le domaine des réponses, c’est plutôt celui des questions puisque, comme toutes les disciplines établissant des hypothèses et cristallisant celles-ci sous la forme de théories, elle passe son temps à remettre en question ce qu’elle a établi. Il n’y a pas sur ce point de différence entre la philosophie et la physique, si ce n’est sur le terrain de l’organisation générale : les sciences constituent, sur l’assentiment d’une communauté scientifique dialoguant en permanence, des énoncés considérés, tant qu’ils ne sont pas destitués par l’expérimentation, comme recevables. La philosophie, n’ayant pas de nécessité à bâtir de tels accords entre penseurs, se constitue moins en de grands ensembles cohérents caractérisant une époque, sauf lorsque d’autres autorités (religieuses, politiques) l’y conduisent. Au mieux, elle constitue des courants, mais elle ne se cristallise pas en grand paradigme général qui imposerait sa loi sur le temps long. Mais comme on l’a vu plus tôt en évoquant Karl Popper, à strictement parler, questionner la science pour en obtenir des réponses, c’est confondre le scientifique, qui est un chercheur, et le savant, qui ne fait que transmettre ce que, depuis sa position d’autorité, il croit savoir. Dans l’Antiquité, Socrate distinguait deux types de sages : ceux qui croyaient savoir, et ce qui étaient conscients de leur ignorance. Cette distinction est pertinente en sciences, aussi : les savants croient ou font croire qu’ils sont parvenus à l’issue du processus de recherche, et que depuis le point culminant que leur offre leur connaissance, ils peuvent enseigner aux autres la vérité. Les scientifiques, eux, sont plus modestes dans leurs affirmations ; ils diront que « en l’état actuel de la science », on peut émettre telle ou telle hypothèse. Mais ils savent, aussi, que les énoncés actuels seront, un jour ou l’autre, questionnés à leur tour, et reconnus comme insuffisants, ou même faux.
Conclusion
Ce n’est donc pas qu’il y ait certaines questions auxquelles aucune science ne répondrait. Il faudrait plutôt considérer qu’il y a des questions que telle ou telle science ne poserait pas. Par exemple, les sciences expérimentales ne poseraient pas de questions concernant le sens, préférant se concentrer sur la recherche de lois à l’œuvre dans la matière. Mais à strictement parler, aucune science, épistémologiquement digne de ce nom, ne prétend vraiment apporter de réponses aux questions qu’elle pose et repose, inlassablement. C’est là que se trouve le recours aux experts, quel que soit le domaine dans lequel on les fait intervenir : si on les consulte en espérant obtenir d’eux des réponses définitives, on se trompe sur ce qui fait leur qualité première. Finalement, comme les philosophes, le moment crucial de leur activité, c’est celui du questionnement. Les réponses, elles, sont toujours provisoires, et n’ont un intérêt que pour agir ponctuellement, pas pour établir un rapport sain avec la vérité, celle-ci se trouvant, décidément, ailleurs.
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Toutes les illustrations sont extraites du film de Christopher Nolan, Interstellar (2014). La toute dernière photographie montre Kip Thorne, prix Nobel 2017 de physique, qui assista le réalisateur du film en tant que conseiller scientifique